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Photo du rédacteurJune Anga

Quelle production design pour Superman: Legacy ?

Il aura fallu attendre de nombreux mois après l'annonce de l'attribution de la production design à Beth Mickle, collaboratrice de longue date de James Gunn, pour en avoir des nouvelles autour du film Superman: Legacy. Les choses avancent sans doute et une interview à ScreenRant suscite évidemment la curiosité.


Quel est le parcours de Beth Mickle ? Quelle part prend-elle dans le projet de James Gunn ? Quelle vision a la production designer Mickle sur ce film qui doit lancer le DCU ? Que peut-on imaginer du travail et de la ligne artistique qu'elle pourrait adopter pour Superman: Legacy ? etc.

Voyons ce que l'on apprend dans sa dernière interview.



Qui est Beth Mickle ?

Elizabeth dite "Beth" Mickle est une production designer américaine, c'est-à-dire une architecte de la décoration ou encore cheffe décoratrice depuis quelques années déjà et un premier travail en 2002 pour le court-métrage horrifique de son frère Jim, The Underdogs. Cela la confirme dans son choix de carrière avec des études à l'université de Columbia à New York.


Elle avance alors avec Madness and genius l'année suivante puis 212, Alchemy et Half Nelson en 2005, différents films de festivals indépendants. Ce film-ci est la première rencontre avec Ryan Gosling qui est alors nommé aux oscars. Elle poursuit dans le monde "indé" plus ou moins horrifique les années suivantes et continue à se développer comme dans The Last Lullaby (avec Tom Sizemore) et Sugar en 2008, Âmes en stock avec Paul Giamatti, avant An Englishman in New York avec John Hurt en 2009. Beth Mickle est alors nommée pour la première fois aux BAFTA du meilleur Production Design pour ce dernier film.


Si, en 2010, Night Catch Us avec Anthony Mackie est primé, Mickle intervient dans de petits films sans succès avant d'entrer dans la cour des grands en 2011 avec le film de Nicolas Winding Refn, Drive. Cette deuxième collaboration avec Ryan Gosling est un succès mondial avec une esthétique exceptionnelle qui ne laissait alors pas indifférent. Son équipe et elle sont d'ailleurs nommés par l'Art Directors Guild pour un prix d'excellence.




Le cheffe décoratrice continue son chemin dans le monde indépendant avec Arbitrage et Sex Therapy en 2012, avant de retrouver le duo Gosling/Refn avec Only God Forgives qui ouvre le festival de Cannes 2013 et l'amène à une nouvelle nomination au Danemark. Elle retrouvera même Gosling réalisateur débutant en l'accompagnant sur son premier film Lost River en 2014.


Son parcours s'étoffe de 2 Guns (2013), Diversion (2015) et Beauté cachée (2016) avec Will Smith, La Famille Fang et Whiskey Tango Foxtrot en 2015 et 2016. En 2017, elle est la responsable du design pour la série The Deuce, lancée sur HBO le 10 septembre de la même année. Elle y dresse une ambiance des années 1970 et 1980 intéressante.



Beth Mickle a été récompensée en 2019 pour Brooklyn Affairs, le deuxième film réalisé par Edward Norton plaçant l'histoire dramatique et policière dans les années 1950.



Beth Mickle primée !


À partir de 2021, si l'on excepte le film Cher Evan Hansen plutôt boudé par la critique, la designer est indubitablement liée à James Gunn. Elle collabore à :

  • The Suicide Squad (2021),

  • Le spécial Gardiens de la Galaxie (2022), avant le dernier opus Les Gardiens de la Galaxie, Vol. 3

  • et désormais Superman: Legacy.



Quelle production design peut-on espérer ?

Le fort ancrage dans le monde de l'indé(pendant) a structuré l'approche de Mickle avec un art assumé de l'efficacité, de la "débrouillardise" ou de l'"ingéniosité". Cela lui a appris "à penser de manière créative, à trouver des solutions créatives et à travailler très rapidement", disait-elle. La cheffe décoratrice a, sans aucun doute, du faire un maximum avec de bien faibles budgets avant de poser le pied dans le monde du MCU de Marvel.


Dans son interview autour de The Suicide Squad, Beth Mickle indiquait que James Gunn était un réalisateur "ouvert d'esprit et compréhensif" qui cherchait pour Les Gardiens de la Galaxie Vol. 3 "quelqu'un qui sorte des sentiers battus, qui soit frais et nouveau", tout en assurant "une plus grande représentation". Pour elle, l'action de Gunn de la sélectionner était "un énorme acte de foi en [la] choisissant en 2018 [...] il [l]'a sortie d'un chapeau, ce qui a changé [sa] vie". Recalée précédemment pour sa non-expérience des gros budgets, son expérience "indé" a cette fois été le bon atout. Prête à tout pour une nouvelle opportunité après ce tournage qui s'est très bien passé, James Gunn a ensuite poursuivi avec elle quelques mois plus tard son travail pour The Suicide Squad.


Le design d'un Drive ou d'un Deuce est un design relativement "concentré", tout en étant très marqué en termes de couleurs et d'ambiances. Afin de répondre aux idées de Gunn pour The Suicide Squad, la créative s'est inspirée des films de guerre des années 1970 tout en proposant une coloration plus forte au fur et à mesure du film. De plus, Mickle et ses équipes se fondaient sur des effets pratiques pour mettre en place les atmosphères tout en étant réaliste. Il s'agissait d'être proches des guerriers, dans une jungle "réelle" qui s'approcherait de celle d'un Platoon ou d'un Apocalypse Now, jusque dans "[la] boue, [la] poussière et [la] saleté".


The Suicide Squad

Autour de l'apport de son expérience "indé" pour son travail par la suite dans Les Gardiens de la Galaxie, la cheffe décoratrice indiquait :

Ce monde [ndlr : indé] m'a vraiment permis de prendre des décisions, de suivre mon instinct avec plus d'assurance, de lire rapidement les éléments visuels et de savoir lequel choisir pour aller de l'avant. Je suis toujours heureuse d'avoir ces compétences dans ma poche lorsque je fais ces films plus importants, ce qui a été un plaisir. C'est un gigantesque bac à sable qui n'a pas de limites. Pour un concepteur, c'est tout simplement passionnant.




On trouve donc une mise à profit de son expérience pour le monde du Maître de l'évolution du film avec ses Humanimaux et de vastes paysages, ou encore pour le vaisseau spatial des Gardiens, le Bowie, construit par les équipes de Mickle en seize semaines. Le "plus grand vaisseau spatial interconnecté jamais réalisé pour un film Marvel" remplissait un plateau de 20000 pieds carrés (soit environ 1860 mètres carrés) et comportait trois étages d'espace de tournage. L'idée était de donner aux acteurs et à l'équipe de tournage un véritable sens de la perspective lorsqu'ils s'engageaient dans le décor. Ce n'était pas une recréation en CGI (Computer-Generated Imagery, effets spéciaux numériques) d'un intérieur galactique, mais une approche de "practical" également avec des plateformes et ponts pour filmer, circuler et organiser les scènes.




En se fondant sur les concept arts des artistes estampillés Marvel comme Andy Park (primé pour Avengers: Endgame, Black Panther, Doctor Strange et Captain America : le soldat de l'hiver), Shane Baxley (Obi-Wan, Loki), Tully Summers (primé pour Avengers: Endgame, Black Panther et Passengers), Matt Tkocz (Bumblebee) ou encore Jared Krichevsky (Godzilla vs Kong), elle a pu œuvrer sur le design de l'univers des Gardiens de la Galaxie Vol.3.


Le design du Maitre de l'évolution a été également conceptualisé avant selon les lignes directrices de Gunn. Si le personnage a une apparence légèrement différente de celle des bandes dessinées, cela reste une tenue violette et le visage de l'acteur a été maquillé avec des prothèses au lieu d'avoir un aspect complètement mécanique. Le film s'est assuré ainsi que les images étaient au service de l'interprétation de Chukwudi Iwuji dans le rôle.




D'autres besoins comme celui d'un autre vaisseau spatial nécessitait des effets spéciaux pour rendre la vision de Gunn possible. Mickle alterne donc volontiers, selon le besoin, entre numérique et practical pour concrétiser les souhaits du réalisateur.


Certains de ces artistes seront probablement de la partie pour Superman: Legacy, mais si on y ajoute les artistes DC désormais accessibles, James Gunn dispose d'un arsenal créatif quasi-illimité pour tendre vers de magnifiques réalisations. Mickle est talentueuse et peut proposer de bien belles choses.



Une collaboratrice de Gunn

L'article de ScreenRant indique l'entente entre Gunn et Mickle quant à la ligne directrice adoptée sur les plans créatifs comme collaboratifs. Elle évoque une "vision limpide" comme le cristal pour le film Superman: Legacy et les méthodes du réalisateur.


[...] Cela signifie que je vais travailler sur le nouveau film de Superman, et ce n'est pas un mince honneur. J'en suis très heureuse. Nous sommes tous très excités de faire partie de l'équipe. Nous avons la chance qu'il ait une vision très limpide de ce qu'il veut faire de ses films. Ce n'est pas souvent le cas. La plupart du temps, c'est vous qui la trouvez, ou bien c'est un concepteur de production et un costumier qui la trouvent pour le réalisateur. Mais il arrive toujours avec une formidable première version du scénario, ce qui est aussi très rare, et une idée très claire de la façon dont le film va être tourné, de ce qu'il veut qu'il ressente. Il a des références fortes. Il a des références musicales fantastiques, et il s'exprime très clairement à ce sujet. Il dresse vraiment cette merveilleuse feuille de route que mon équipe, moi-même et les autres départements créatifs devons suivre. Et cela commence toujours par de grands et beaux mondes. Nous nous retroussons les manches et nous proposons des concepts et des références que nous partageons avec lui. Il nous donne d'excellents commentaires, nous aide à diriger, mais il laisse aussi beaucoup de liberté créative, ce qui est également rare, surtout pour quelqu'un qui a une telle vision. Ainsi, nous pouvons tous nous épanouir et nous amuser pendant que nous le faisons, et nous avons tous l'impression d'y contribuer à la fin de la journée.

De toute évidence, un lien réel existe entre les deux individus et "[elle doit] absolument tout à James [Gunn]". Le réalisateur suscite une indéniable proximité avec ses collaborateurs et une volonté de renouveler l'expérience collaborative. Nous évoquions le cas de Nathan Fillion lors de la présentation de sa sélection pour le rôle de Guy Gardner/Green Lantern pour le film.


Le réalisateur ne laisse pas indifférent.


Le décryptage de cet extrait d'entretien montre évidemment une certaine fierté lorsqu'on travaille sur l'univers de L'homme d'acier, mais pas seulement. Il apparait que la méthode de Gunn reposerait sur un fort travail d'écriture en amont afin de proposer un script solide, "brillant", "formidable" dès sa première version pour orienter l'action de chaque professionnel engagé dans le projet. L'approche du script "fondamental" est confirmée par les dires du responsable des effets spéciaux Stephane Ceretti dernièrement.


Il s'appuiera sur de fortes "références" afin d'ancrer son univers. Doit-on s'attendre à un mélange de toutes les ressources citées en référence depuis des mois ? Ou bien à un choix de quelques éléments parmi tout cela qui collerait strictement à ses goûts ? Sans doute un peu des deux.


Une "vision limpide" est nécessaire pour donner la direction artistique et encore plus pour un projet comme Superman. Comme il a pu le faire pour Les Gardiens de la Galaxie, l'esthétique très marquée par le travail de Mickle sera guidée par une "feuille de route". L'approche est une forte direction en amont du réalisateur pour créer les concepts. Les collaborateurs aux références communes n'ont plus qu'à suivre le fil rouge dessiné, la "vision" très claire de James Gunn. Beth Mickle indique toutefois qu'il donne une grande "liberté créative" pour les concepts qui seront proposés à partir des bases qu'il a en tête. Donc, un des objectifs de la méthode Gunn semble être de fixer des repères forts et, ensuite, de laisser les directeurs de département "[s']épanouir et [s']amuser pour contribuer le mieux possible au projet et ainsi donner le meilleur d'eux-mêmes.


La supervision de Gunn est par ailleurs présentée comme un échange ouvert avec ses directeurs sur ces directives premières. Les retours et commentaires permettent d'affiner les propositions au fur et à mesure. De notre côté, comme de celui des fans, il ne nous reste plus qu'à attendre de voir ses concept arts, ainsi que ces fameuses premières directives.



Quelle direction pour Superman: Legacy ?

Si, pour The Suicide Squad et ses anti-héros, il ne s'agissait pas de faire dans le grandiose, généralement visé pour les super-héros, l'angle est évidemment différent pour le film Superman: Legacy. Ce sera un défi tout autre. Il faudra sans doute renouer avec le grandiose qu'implique le personnage et il sera donc très intéressant de voir comment Mickle et Gunn rendront cela dans le film.


Quel choix a-t-il fait pour l'univers autour de Superman ? Pour Metropolis ? Pour Superman lui-même ?


Les mêmes interrogations se posent pour la bande son. Beth Mickle nous laisse entendre que James Gunn a de "fortes références musicales"... Mais attention, nous devons mettre en garde James Gunn par avance (s'il devait nous lire directement). Il n'est en effet pas sûr qu'une "playlist" (liste de lecture) de chansons de telle époque ou comprenant des tubes comme pour les Gardiens de la Galaxie soit la bonne chose à faire, surtout quand on passe derrière John Williams et Hans Zimmer...


Au final, James Gunn semble s'entourer d'une équipe liée à lui, proche, dévouée et alignée (au moins sur le plan de la communication). Il a les moyens créatifs et, si les moyens financiers sont là, le film pourra être une merveilleuse réalisation qui en pourrait en surprendre plus d'un.


De quelle marge de manœuvre et de quels repères disposera Mickle dans son travail ? Retrouvera-t-on ce jeu sur les couleurs qu'elle a coutume de proposer ? Retrouvera-t-on des décors feutrés et marqués comme pour ses films précédents ? Restera-t-elle sur des approches de pratical en évitant le tout numérique ? Les artistes DC et le matériel de base immense autour de Superman seront-ils utilisés à bon escient dans le respect du personnage de Superman et de son lore ? Quelle marque ou empreinte James Gunn voudra-t-il laisser ? Quelles directives trouve-t-on dans ce premier script fondamental ? L'identité DC y est-elle préservée et mise en lumière avec au sommet le Dernier fils de Krypton ?


Nous n'avons pas encore les réponses à ces nombreuses questions et nous naviguons entre crainte et espérance en attendant la sortie du film en 2025. La réponse immédiate pour les fans : tout est possible, mais il faut prendre notre mal en patience ! Nous verrons peut-être déjà plus clair avec les premiers concept arts pour Superman: Legacy.


En attendant, n'oubliez pas L'homme d'acier, l'espoir, Superman... !


JA


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